Les personnes âgées ont, elles aussi, le droit de s'aimer



C'est un sujet tabou, un vrai. Dans les maisons de retraite, l'amour et la sexualité entre personnes âgées existent. Provoquant souvent la gêne - voire le rejet - des familles comme du personnel. Des initiatives tentent de préserver cette délicate intimité.
Ils ne se quittent pas de la journée, se cherchent dès qu'ils se perdent, les mains enlacées, glissant dans les couloirs, du matin au soir. Ils sont comme deux adolescents, sourires complices, regards infinis, assis tous les deux, là, sur le rebord du lit, chambre 312.
Elle parle, il la regarde, les yeux agrandis. Elle dégage une douceur fragile, Marcelle, dans son chemisier à fleurs : "On s'est rencontrés il y a cinq ans, avec Jean-Noël. C'était au moment du repas. On s'est mis à discuter, de suite... et au fil du temps, on est tombés amoureux."
Jean-Noël, 70 ans, était jardinier, Marcelle, 67 ans, assistante maternelle. Lui n'a jamais convolé. Elle s'est mariée, a eu des enfants, un époux qui l'a quittée quand ceux-ci sont devenus grands. A l'aube de leur vieillesse, Marcelle et Jean-Noël sont entrés très tôt dans cet établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et ont joint leurs solitudes. Des "bisous" volés au temps qui glisse, des frissons amoureux, des parties enfiévrées de dominos, des balades, tous les jours, aux alentours de la résidence Jacques-Brel de Guipavas (Finistère).
L'an dernier, il l'a demandée en mariage. Ils étaient debout, tous les deux, dans sa chambre. Il lui a pris la main : "Je t'aime beaucoup, Marcelle, tu sais." Et puis, pour la première fois de sa vie, il s'est lancé, comme une bouteille à la mer : "Et si on se mariait?" Elle a dit oui. Elle ne savait pas ce qu'elle disait.Ses enfants ont mal réagi. Pas question.
"Tu as vu l'âge que tu as, maman? Tu es trop vieille. Et lui aussi." Marcelle fixe la table, longuement. "On a quand même fait une petite cérémonie chez le cousin de Jean-Noël, qui est prêtre, balbutie-t-elle.

source: topsanté.com