Nos adolescents passent leur temps devant l'écran et préféreraient voir leurs amis plutôt que leur famille. Mais avant de leur faire la leçon, les parents devraient d'abord s'interroger sur leur part de responsabilité dans le caractère "asocial" de leurs enfants.
Atlantico : On entend souvent dire que les ados des temps modernes ont perdu de leurs qualités relationnelles : ils passent tellement de temps sur les réseaux sociaux qu'ils ne savent plus comment se comporter en société. Êtes-vous en accord avec ce postulat ?
Pierre Duriot : Non ! Certains adolescents ont effectivement perdu le sens de la relation, mais ce n'est pas la faute des réseaux informatiques. Cette qualité de la relation s'apprend très jeune, bien avant l'adolescence et même avant l'entrée sur les réseaux sociaux. Il faut, pour pouvoir communiquer de manière qualitative avec autrui, reconnaître "l'altérité", l'autre, avoir de l'empathie pour lui, savoir l'écouter, lui reconnaître le même potentiel de compréhension qu'à soi, le considérer comme un alter-ego et évoluer dans un code de langage commun. Ce sont ces paramètres-là qui sont altérés chez nos adolescents autocentrés, anciens enfants pour la plupart très gâtés, élevés au centre des familles, ayant en permanence des adultes à leur service qui leur donnent, tant qu'ils sont petits, tout et tout de suite. Mais on a aussi des enfants sans cadre, à qui on a peu parlé, avec qui on a peu joué et peu découvert, d'où une incapacité à communiquer sereinement à cause d'un déficit de codes communs de langage et de fonctionnement. Et ce sont ces déficits de communication préalables qui poussent des adolescents peu armés pour la discussion dans le réel vers des réseaux sociaux qui ont le principal avantage de ne pas présenter de danger de contradiction : au moindre désaccord, on coupe la conversation, ce qui a une dimension rassurante.
source: topsanté.com